samedi, mars 31, 2007
Banni!
Vous vous rappelez de Lou Ye? Nous avions déjà papoté de ce réalisateur chinois l'an dernier, au moment du Festival de Cannes. Il y avait en effet présenté son film Summer Palace où l'on causait des événements de la place Tienanmen, mais sans l'autorisation préalable de la sympathique Administration d'État Chinoise de la Radio, du Film et de la Télévision , ce qui lui avait valu d'être interdit de tournage en Chine pendant 5 ans. Pas une nouveauté pour ce cinéaste qui avait déjà été banni de la sorte après la présentation, elle aussi non autorisée, de son Suzhou River au festival de Rotterdam en 2000. Comment dit-on tolérance et ouverture en chinois déjà?
Malgré tout, une bonne nouvelle. The Guardian révélait que le brave cinéaste était en train de préparer son nouveau film, The Last Hour, relatant l'histoire d'un Palestinien abandonné par sa femme après avoir passé 10 ans dans une prison israëlienne.
Adapté de et par Mazen Saadeh (également documentariste), le film sera tourné en Palestine, si Lou Ye parvient à récolter les fonds nécessaires.
La mondialisation, ça a quand même parfois du bon.
mercredi, mars 28, 2007
A la trappe
À la trappe Libre échange, ont annoncé hier la direction de Télé-Québec et la boîte de production Zone 3. La bande à Lévesque arrêtera en effet, ce jeudi, de papoter de culture en toute liberté pour mieux retourner aux oubliettes.
Trop cher, pas assez d'auditeurs, rien de nouveau dans la rengaine. Sauf peut-être ce sentiment, toujours plus douloureux, de désillusion à voir les bastions culturels s'écrouler les uns après les autres, sans bruit.
Au point qu'une question me taraude: est-ce tout simplement possible d'avoir une émission culturelle de qualité à la télévision? Bien sûr, on me rétorquera, mais il y a Prochaine Sortie ou Mange ta Ville. Ce à quoi je répondrai, oui, car je sais faire preuve de concision quand le temps est venu. Mais ces émissions restent encore plutôt confidentielles, comme l'était le show de Lévesque. Si on y mettait des dindes en maillot de bain ou des valises pleines de cash, est-ce que ça aiderait la culture à la télé?
Décidément
...foot et cinéma font bon ménage ces temps-ci
Alors que l'argentin Marco Risi crée en ce moment en Italie un mini-scandale avec son film La Mano di Dio relatant la vie de ce coquin de Maradona (le titre du film faisant référence à cette main qui aida le joueur à rentrer un but et à gagner un quart de finale de coupe du monde contre l'Angleterre en 86; le scandale venant, lui, du fait que le film traiterait sa cocaïnomanie un peu trop légèrement), alors que Zidane fait le joli paon dans une oeuvre mi-film, mi-art, on apprend qu'une autre tête forte s'apprête à nous révéler sa révérence documentaire au footballeur argentin, Emir Kusturica.
Je dois ici avouer une faiblesse: ma passion pour les films de sport. J'y aime les émotions pures, simples, l'exaltation de l'effort et du dépassement de soi, les petits héros devenant grands. J'aime Rocky, Friday Night Lights, Million Dollar Baby et les autres. À chaque fois, je me laisse prendre comme une bleue avec le plus grand des plaisirs.
Mais ce que j'aime, justement, c'est cette idée follement naïve que tout un chacun a, en soi, l'occasion de devenir un héros, que le sport peut servir d'ascenseur social, parmi d'autres.
Je n'ai rien contre Maradona ou Zidane, je n'ai pas vu les films dont on parle ici, sauf le Zidane, mais je remarque simplement que la tendance à la vedettisation de tout, tout le temps, commence à me courir un peu sur le haricot.
mardi, mars 27, 2007
Gueule de bois
Jean Dion, dans son infinie sagesse, a déjà écrit dans Le Devoir:
"Les campagnes électorales sont une excellente occasion de dire n'importe quoi, que ne surpassent peut-être que les lendemains d'élections."
Il n'avait peut-être pas tort.
"Les campagnes électorales sont une excellente occasion de dire n'importe quoi, que ne surpassent peut-être que les lendemains d'élections."
Il n'avait peut-être pas tort.
jeudi, mars 22, 2007
Affiche-moi ça
Un site piqué à Kevin où l'on retrouve quelques posters polonais de films américains. Regardez celle de SpartaKus (oui, avec un K), comme elle est jolie!
Oh puis tenez, un autre, comme ça, cadeau pour fêter le printemps.
Je trouve ces affiches terriblement belles, terriblement artistiques et je ne comprends toujours pas pourquoi les affiches de films sont, dans leur grande majorité, encore considérées comme de vulgaires objets de promo. Si vous êtes allés faire votre tour à l'expo Les refusées (qui présentait certains projets d'affiches de films québécois refusés), vous savez de quoi je parle.
dimanche, mars 18, 2007
Ballon d'or
Par la grâce de ces dvd que je ramène parfois avec moi de voyages en Europe, j'ai vu hier soir Zidane, un portrait du XXIème siècle, présenté notamment au dernier festival de Cannes.
Réalisé par deux artistes, Philippe Parreno et Douglas Gordon, le "documentaire" s'amuse à suivre en temps réel ce héros français qu'est Zidane, restituant les images captées par 17 caméras haute-définition placées autour du terrain et braquées sur le footballeur.
En soi, le match opposant le Real Madrid au Villareal (dans le championnant espagnol, le 23 avril 2005) n'a que peu d'importance. L'homme, oui. Redonnant toute sa valeur humaine au spectacle sportif, le film nous plonge même d'une certaine façon dans l'intimité de ce grand bonhomme réservé qu'est Zidane. Concentration, solitude, raffinement des gestes et des pensées retranscrites en bas de l'écran. L'art qui s'introduit, furtivement, dans le sport et réussit l'incroyable pari de nous faire voir notre monde différement.
Oh, l'hypnotisante musique composée par Mogwai n'y est certainement pas pour rien. Peut-être est-ce aussi Zidane lui-même et sa stature hors du commun qui nous rive à l'écran. Mais le montage du film donnant le sentiment absolu d'être sur le terrain, d'être avec cet homme, faisant de lui un héros parfaitement mythique, est certainement lui aussi au coeur du mécanisme de fascination que le film enclenche.
Par la bêtise de nos préjugés, l'on croit souvent l'art et le foot appartenir à des mondes irréconciliables. Zidane, un portrait du XXIème siècle vient nous prouver le contraire. Pour cette seule raison, il mérite le coup d'oeil.
Pour les chanceux montréalais, le film sera présenté le jeudi 29 mars, à 19h, au cinéma Impérial, gratuitement, ainsi que le dimanche 24 juin, 17h à la Cinémathèque Québécoise (dans le cadre des Rencontres Internationales cinéma et sport de Montréal).
samedi, mars 17, 2007
Il y a quelques semaines, un certain éditorialiste d'une certaine publication gratuite se vantait de travailler dans "l'hebdo culturel le plus cohérent et le plus crédible du Québec"
Rien que ça? Les egos ont flattés, tout le monde est content et la phrase serait probablement passée inaperçue si hier un autre chroniqueur du même hebdo ne s'était pas aventuré à poster le message le plus incohérent et le moins crédible possible. Bon dieu, lorsqu'on jouit de ce genre de tribune, n'est-on pas censé défendre la culture, l'aimer passionément, en vouloir toujours plus? N'est-on pas censé balayer du revers de la main et combattre les discours faisant des artistes de gros bébés gâtés, se plaignant le ventre plein? N'est-on pas censés vivre dans ce milieu et le comprendre mieux que quiconque?
À un moment où même les intellectuels sortent de leurs tanières pour s'interroger sur la crise de culture, n'est-on pas censé essayer, au moins, de perdre ses oeillères?
Moralité: il ne faut pas toujours croire ce qu'on lit dans les blogues.
mercredi, mars 14, 2007
La vie en rose
Olivier Dahan nous fait le coup du souviens-toi
Piaf. La môme. Monument de la chanson française. Des gestes sur scène à faire pâlir d’envie une mama italienne. Une voix à crever les cœurs. Piaf, petit oisillon des rues devenue aigle du micro. Une légende.
Le cinéma s’était déjà payé la visite obligatoire du site historique. C’était sous la direction de Claude Lelouch en 1983, dans Edith et Marcel, et Evelyne Bouix se tapait l’ingrat boulot de faire revivre la dame en noir. Aujourd’hui, en 2007, c’est sous la houlette d’Olivier Dahan que le mythe reprend des forces.
Pourtant, dieu sait qu’on ne l’attendait pas aux commandes de ce film-monstre, Dahan. Déjà mort, Le petit Poucet, Les Rivières Pourpres 2, pas exactement une filmographie de rêve, ça. Rien non plus pour le prédestiner à grimper cet Everest. Rendons à César…, vu l’ampleur de la tache, il ne s’en sort pas si mal.
Il faut dire que la vie de Piaf fut loin d’être un long fleuve tranquille de gloire, d’art et de fortune, un parcours prêt-à-filmer. Non, Piaf, ce sont plutôt l’enfance misérable dans les rues de Belleville au début du siècle, la maison close de grand-maman, un papa artiste de cirque fauché, la manche dans la rue, un amour de cinéma fauché en plein vol et l’alcool et la morphine en guise de cache-misère. Mais c’est plutôt par touches impressionnistes, évitant de s’apesantir dans un pathos déplacé que Dahan dépeint cette vie, volant de l’enfance de la môme à ses éclats new-yorkais, de son lit de mort à son adolescence, de sa grandeur à sa déchéance sans souci de respecter une quelconque linéarité chronologique.
Et si l’ensemble se fait parfois un peu trop succession de tableaux léchés présentant chacun à son tour une vedette venue faire son petit tour (de Depardieu à Emmanuelle Seigner, en passant par Sylvie Testud et Pascal Gregory, le who’s who du cinéma français est présent), le rythme de l’œuvre, lui, en devient prenant, évitant le piège du biopic en 3 actes prévisibles. Évidemment, ce choix narratif escamote aussi quelques passages importants de la vie de Piaf, laissant au spectateur le libre plaisir de combler les trous (Moustaki, Montand et Aznavour, essentiels dans le parcours de la môme sont ainsi à peine effleurés)
Mais La vie en rose ne serait rien sans celle qui le porte de bout en bout, avec une présence assez soufflante : Marion Cotillard. Il y a quelque chose de magique dans sa prestation. Car si ses gestes outrés, maniérés et sa gouaille trafiquée agacent dans la première demi-heure du film, c’est tranquillement, petit à petit, que la métamorphose a lieu sous nos yeux. Comme un papillon sortant de sa chrysalide, Cotillard devient Piaf, jouant aussi bien l’exubérance de ses 20 ans que la misère physique et morale de ses 47 ans (l’âge de sa mort, elle en paraissait 87).
Lui donnant vie jusqu’au bout des ongles sans jamais l’imiter, Cotillard joue tout avec la même intensité, la même gravité faisant dès lors de Piaf ce personnage plus grand que nature, avec ses bonheurs et ses failles, ses gouffres et ses douceurs. Et dans quelques moments de grâce, comme cette joie d’enfant qui frétille dans ses yeux lors de sa première rencontre avec Marlène Dietrich ou cette souffrance pure qui démantibule son corps lorsqu’on lui annonce la mort de son amoureux, le boxeur Marcel Cerdan, on peut furtivement lire un des plus beaux hommages qu’on ait pu rendre à la môme Piaf.
Piaf. La môme. Monument de la chanson française. Des gestes sur scène à faire pâlir d’envie une mama italienne. Une voix à crever les cœurs. Piaf, petit oisillon des rues devenue aigle du micro. Une légende.
Le cinéma s’était déjà payé la visite obligatoire du site historique. C’était sous la direction de Claude Lelouch en 1983, dans Edith et Marcel, et Evelyne Bouix se tapait l’ingrat boulot de faire revivre la dame en noir. Aujourd’hui, en 2007, c’est sous la houlette d’Olivier Dahan que le mythe reprend des forces.
Pourtant, dieu sait qu’on ne l’attendait pas aux commandes de ce film-monstre, Dahan. Déjà mort, Le petit Poucet, Les Rivières Pourpres 2, pas exactement une filmographie de rêve, ça. Rien non plus pour le prédestiner à grimper cet Everest. Rendons à César…, vu l’ampleur de la tache, il ne s’en sort pas si mal.
Il faut dire que la vie de Piaf fut loin d’être un long fleuve tranquille de gloire, d’art et de fortune, un parcours prêt-à-filmer. Non, Piaf, ce sont plutôt l’enfance misérable dans les rues de Belleville au début du siècle, la maison close de grand-maman, un papa artiste de cirque fauché, la manche dans la rue, un amour de cinéma fauché en plein vol et l’alcool et la morphine en guise de cache-misère. Mais c’est plutôt par touches impressionnistes, évitant de s’apesantir dans un pathos déplacé que Dahan dépeint cette vie, volant de l’enfance de la môme à ses éclats new-yorkais, de son lit de mort à son adolescence, de sa grandeur à sa déchéance sans souci de respecter une quelconque linéarité chronologique.
Et si l’ensemble se fait parfois un peu trop succession de tableaux léchés présentant chacun à son tour une vedette venue faire son petit tour (de Depardieu à Emmanuelle Seigner, en passant par Sylvie Testud et Pascal Gregory, le who’s who du cinéma français est présent), le rythme de l’œuvre, lui, en devient prenant, évitant le piège du biopic en 3 actes prévisibles. Évidemment, ce choix narratif escamote aussi quelques passages importants de la vie de Piaf, laissant au spectateur le libre plaisir de combler les trous (Moustaki, Montand et Aznavour, essentiels dans le parcours de la môme sont ainsi à peine effleurés)
Mais La vie en rose ne serait rien sans celle qui le porte de bout en bout, avec une présence assez soufflante : Marion Cotillard. Il y a quelque chose de magique dans sa prestation. Car si ses gestes outrés, maniérés et sa gouaille trafiquée agacent dans la première demi-heure du film, c’est tranquillement, petit à petit, que la métamorphose a lieu sous nos yeux. Comme un papillon sortant de sa chrysalide, Cotillard devient Piaf, jouant aussi bien l’exubérance de ses 20 ans que la misère physique et morale de ses 47 ans (l’âge de sa mort, elle en paraissait 87).
Lui donnant vie jusqu’au bout des ongles sans jamais l’imiter, Cotillard joue tout avec la même intensité, la même gravité faisant dès lors de Piaf ce personnage plus grand que nature, avec ses bonheurs et ses failles, ses gouffres et ses douceurs. Et dans quelques moments de grâce, comme cette joie d’enfant qui frétille dans ses yeux lors de sa première rencontre avec Marlène Dietrich ou cette souffrance pure qui démantibule son corps lorsqu’on lui annonce la mort de son amoureux, le boxeur Marcel Cerdan, on peut furtivement lire un des plus beaux hommages qu’on ait pu rendre à la môme Piaf.
mardi, mars 13, 2007
Les yeux ouverts
Shortbus sort en DVD. Les galipettes sont disponibles à la maison et l'occasion toute trouvée de faire paraître ici une critique écrite lors de sa sortie en salles
Filmer la jouissance est devenu, ces dernières années, un événement dont l’on sort rarement indemne au cinéma. De Vincent Gallo à Catherine Breillat, en passant par Virginie Despentes, la culture moderne semble en effet avoir choisi ce moment d’une intimité renversante comme porte-drapeau d’un profond mal-être social, renvoyant à des scènes au moins malsaines, au pire profondément désespérées.
Et voilà qu’arrive John Cameron Mitchell, jeune réalisateur natif du Texas dont le premier essai, Hedwig and The Angry Inch marquait déjà un regard et une sensibilité hors du commun sur des personnages que la société préfère exclure de la norme sexuelle. Partageant toujours cette sensibilité profondément humaniste, Shortbus fait encore évoluer ce propos, formidables acteurs prêts à tout, et trouvés par casting sauvage, en tête.
New York, aujourd’hui. Sofia (convaincante Sook-Yin Lee), une sexologue mariée en mal d’orgasme, Severin, une maîtresse dominatrice déprimée et James (Paul Dawson visiblement inspiré par le réalisateur Jonathan Caouette - qui tient d'ailleurs un petit rôle dans le film - et son Tarnation) et Jamie, un couple gay en quête de nouvelles expériences croisent leurs chemins au Shortbus, un club underground libertin de Brooklyn. Personnages principaux, si l’on peut dire, qui trouvent chacun dans le regard des autres un miroir où affronter leurs démons.
Certes, pour la légende, Shortbus contient son lot de scènes sexuelles plus qu’explicites que Mitchell parvient néanmoins à observer avec une tendresse telle qu’elles ne paraissent jamais gratuites ou déplacées tout en leur donnant consistance en les liant à une véritable pulsion de mort. Mais au-delà de ce premier aspect, forcément cru, Shortbus réussit surtout à dresser le portrait d’une communauté où existe la possibilité de renouer des liens dont le quotidien nous prive. Soulagement. Métaphorisant la profonde tristesse de l’hypersexualisation contemporaine, le film tente en fait de renouer avec une certaine idéologie du cinéma des années 60 : l’euphorie des ensembles. Mais comme le précise un des personnages, Shortbus "c’est peut-être comme les années 60, mais sans espoir".
Réellement mélancolique, évoquant la chair comme un subterfuge bien vacillant à offrir à nos solitudes, Shortbus réaffirme effectivement l’absolue nécessité de la sève que sont les liens sociaux et sentimentaux. Malgré un dernier tiers tirant parfois en longueur et une finale quelque peu idéaliste, le film professe finalement une morale cucul pour certains, rassurante pour d’autres : les ombres du sida et du 11 septembre peuvent bien planer, ce n’est qu’ensemble que l’humanité trouvera une façon de survivre.
Filmer la jouissance est devenu, ces dernières années, un événement dont l’on sort rarement indemne au cinéma. De Vincent Gallo à Catherine Breillat, en passant par Virginie Despentes, la culture moderne semble en effet avoir choisi ce moment d’une intimité renversante comme porte-drapeau d’un profond mal-être social, renvoyant à des scènes au moins malsaines, au pire profondément désespérées.
Et voilà qu’arrive John Cameron Mitchell, jeune réalisateur natif du Texas dont le premier essai, Hedwig and The Angry Inch marquait déjà un regard et une sensibilité hors du commun sur des personnages que la société préfère exclure de la norme sexuelle. Partageant toujours cette sensibilité profondément humaniste, Shortbus fait encore évoluer ce propos, formidables acteurs prêts à tout, et trouvés par casting sauvage, en tête.
New York, aujourd’hui. Sofia (convaincante Sook-Yin Lee), une sexologue mariée en mal d’orgasme, Severin, une maîtresse dominatrice déprimée et James (Paul Dawson visiblement inspiré par le réalisateur Jonathan Caouette - qui tient d'ailleurs un petit rôle dans le film - et son Tarnation) et Jamie, un couple gay en quête de nouvelles expériences croisent leurs chemins au Shortbus, un club underground libertin de Brooklyn. Personnages principaux, si l’on peut dire, qui trouvent chacun dans le regard des autres un miroir où affronter leurs démons.
Certes, pour la légende, Shortbus contient son lot de scènes sexuelles plus qu’explicites que Mitchell parvient néanmoins à observer avec une tendresse telle qu’elles ne paraissent jamais gratuites ou déplacées tout en leur donnant consistance en les liant à une véritable pulsion de mort. Mais au-delà de ce premier aspect, forcément cru, Shortbus réussit surtout à dresser le portrait d’une communauté où existe la possibilité de renouer des liens dont le quotidien nous prive. Soulagement. Métaphorisant la profonde tristesse de l’hypersexualisation contemporaine, le film tente en fait de renouer avec une certaine idéologie du cinéma des années 60 : l’euphorie des ensembles. Mais comme le précise un des personnages, Shortbus "c’est peut-être comme les années 60, mais sans espoir".
Réellement mélancolique, évoquant la chair comme un subterfuge bien vacillant à offrir à nos solitudes, Shortbus réaffirme effectivement l’absolue nécessité de la sève que sont les liens sociaux et sentimentaux. Malgré un dernier tiers tirant parfois en longueur et une finale quelque peu idéaliste, le film professe finalement une morale cucul pour certains, rassurante pour d’autres : les ombres du sida et du 11 septembre peuvent bien planer, ce n’est qu’ensemble que l’humanité trouvera une façon de survivre.
mercredi, mars 07, 2007
La phrase mystique de la semaine
Lue dans Technikart
"Je ne vois pas pourquoi les gens attendent d'une oeuvre d'art qu'elle veuille dire quelque chose alors qu'ils admettent que leur propre vie ne mène à rien" - David Lynch (New York Times)
Ou comment trouver des justifications un tit peu foireuses pour ne pas avoir à commenter son oeuvre...
"Je ne vois pas pourquoi les gens attendent d'une oeuvre d'art qu'elle veuille dire quelque chose alors qu'ils admettent que leur propre vie ne mène à rien" - David Lynch (New York Times)
Ou comment trouver des justifications un tit peu foireuses pour ne pas avoir à commenter son oeuvre...
1,2,3, Spartez
Dans 300, le slip en cuir noir revient à la mode. On préférait les jupettes.
Sous un soleil blafard, une poignée d’hommes se préparent au combat sous la direction de leur chef Léonidas (intense Gérard Butler). Moulés dans de seyants petits slips de cuir noir, leurs capes rouges battent le vent. Le poitrail en avant et le jarret frémissant, leurs profils aquilins émanent la fierté. D’un coup, comme le tonnerre, la terre se met à trembler sous leurs pieds, résonnant du poids de leurs adversaires fondant sur eux comme des buses. Les hommes se regardent et dans leurs yeux se lit cette maxime d’une virilité toute antique : la victoire ou la mort. Bienvenue dans 300, revisitation libre et spectaculaire de la bataille des Thermopyles qui opposa les Spartiates et les Perses en 480 avant Jésus-Christ. Bienvenue dans l’univers de Frank Miller qui le premier eut l’idée de transformer cette épopée en graphic novel sanglante avant que Zack Snyder (Dawn of the Dead) ne nous en fasse cette bouillabaisse filmique, où se mêlent liberté, honneur, justice et body-building.
Oh bien sûr, on en trouvera toujours pour ricaner devant l’esthétique néo-Chippendales se dégageant de l’aventure. On en trouvera aussi pour pouffer devant cette exaltation des corps sains et musclés ou devant ce portrait des Perses aussi manichéen que ridicule (dirigés par un roi divin efféminé, les Perses semblent tout droit sortir d’un freak show qu’aurait chorégraphié Jean-Paul Gaultier période décadence & piercings). On en trouvera même pour rire jaune de la morale nietzschéenne, pour ne pas dire eugéniste, de l’ensemble (les faibles doivent périr, seuls les puissants et les sur-hommes survivront).
Mais ce qui agace le plus dans 300 est plutôt d’un autre ordre. De ce même ordre d’ailleurs qui nous avait déjà fait réprimer quelques bâillements devant Sin City, adapté du même Frank Miller par Robert Rodriguez. En réalité, ce qui fait problème ici est bien l’impression d’assister à une bande dessinée mise en mouvement, jamais à un film. Souci. Car si la BD a la charmante élégance de nous laisser nous imaginer comment relier les cases entre elles, la BD en mouvement, elle, nous prive même de ce plaisir, préférant combler ces trous sans jamais se soucier d’apporter ce petit supplément d’âme qui fait les grands films d’aventures.
Résultat, ce 300 apparaît d’une maîtrise technique certes époustouflante (certains plans lorgnent tant du côté de Delacroix que de Jérôme Bosch), d’un graphisme à couper le souffle, mais également d’une froideur impersonnelle profondément dérangeante. Malgré un dernier tiers venant redonner un peu de souffle et d’épaisseur à cette chronique d’une bataille annoncée, l’exercice de style, qui abuse de ralentis grandiloquents, d’angles dramatiques et de clins d’oeils bien trop appuyés à Lord of The Rings, en arrive même à nous faire regretter nos bons vieux péplums d’antan. Il fallait le faire.
Sous un soleil blafard, une poignée d’hommes se préparent au combat sous la direction de leur chef Léonidas (intense Gérard Butler). Moulés dans de seyants petits slips de cuir noir, leurs capes rouges battent le vent. Le poitrail en avant et le jarret frémissant, leurs profils aquilins émanent la fierté. D’un coup, comme le tonnerre, la terre se met à trembler sous leurs pieds, résonnant du poids de leurs adversaires fondant sur eux comme des buses. Les hommes se regardent et dans leurs yeux se lit cette maxime d’une virilité toute antique : la victoire ou la mort. Bienvenue dans 300, revisitation libre et spectaculaire de la bataille des Thermopyles qui opposa les Spartiates et les Perses en 480 avant Jésus-Christ. Bienvenue dans l’univers de Frank Miller qui le premier eut l’idée de transformer cette épopée en graphic novel sanglante avant que Zack Snyder (Dawn of the Dead) ne nous en fasse cette bouillabaisse filmique, où se mêlent liberté, honneur, justice et body-building.
Oh bien sûr, on en trouvera toujours pour ricaner devant l’esthétique néo-Chippendales se dégageant de l’aventure. On en trouvera aussi pour pouffer devant cette exaltation des corps sains et musclés ou devant ce portrait des Perses aussi manichéen que ridicule (dirigés par un roi divin efféminé, les Perses semblent tout droit sortir d’un freak show qu’aurait chorégraphié Jean-Paul Gaultier période décadence & piercings). On en trouvera même pour rire jaune de la morale nietzschéenne, pour ne pas dire eugéniste, de l’ensemble (les faibles doivent périr, seuls les puissants et les sur-hommes survivront).
Mais ce qui agace le plus dans 300 est plutôt d’un autre ordre. De ce même ordre d’ailleurs qui nous avait déjà fait réprimer quelques bâillements devant Sin City, adapté du même Frank Miller par Robert Rodriguez. En réalité, ce qui fait problème ici est bien l’impression d’assister à une bande dessinée mise en mouvement, jamais à un film. Souci. Car si la BD a la charmante élégance de nous laisser nous imaginer comment relier les cases entre elles, la BD en mouvement, elle, nous prive même de ce plaisir, préférant combler ces trous sans jamais se soucier d’apporter ce petit supplément d’âme qui fait les grands films d’aventures.
Résultat, ce 300 apparaît d’une maîtrise technique certes époustouflante (certains plans lorgnent tant du côté de Delacroix que de Jérôme Bosch), d’un graphisme à couper le souffle, mais également d’une froideur impersonnelle profondément dérangeante. Malgré un dernier tiers venant redonner un peu de souffle et d’épaisseur à cette chronique d’une bataille annoncée, l’exercice de style, qui abuse de ralentis grandiloquents, d’angles dramatiques et de clins d’oeils bien trop appuyés à Lord of The Rings, en arrive même à nous faire regretter nos bons vieux péplums d’antan. Il fallait le faire.
vendredi, mars 02, 2007
Si j'avais des ailes...
...je partirais illico à Los Angeles pour plonger dans les délices du Grindhouse Film Festival, un petit événement mensuel consacré au cinéma d'exploitation!
Et pourquoi donc, demanderiez-vous, avec cette insatiable curiosité qui fait tout votre charme? Tout simplement parce que ce mois-ci, la programmation de la chose a été confiée à rien de moins que Quentin-je suis un geek et je m'assume-Tarantino que, dans l'intimité je n'hésite pas à appeler mon héros!
Voyez un peu:
Du 4 au 6 mars:
THE MACK (1973) and THE CHINESE MACK (1974)
Du 7 au 8 mars:
MACHINE GUN McCAIN (1968) and WIPEOUT (1973)
Du 9 au 10 mars:
THE VAN (1977) and PICK-UP SUMMER (1980) and SUMMER CAMP (1979)
Du 11 au 13 mars:
ROLLING THUNDER (1977) and THE TOWN THAT DREADED SUNDOWN (1977)
Du 14 au 15 mars:
CHINESE HERCULES (1973) and BLACK DRAGON (1974)
Du 16 au 17 mars:
SEX WITH A SMILE (1976) and SEX ON THE RUN (1977) and THE OLDEST PROFESSION (1967)
Tirées de ses réserves personnelles, toutes ces copies sont de vraies références du prochain méfait de Quentin Tarantino: GrindHouse (co-réalisé avec Robert Rodriguez, une moitié chacun pour pas faire de jaloux), dont la sortie est prévue le 6 avril. Vous n'imaginez même pas comme j'ai hâte!
jeudi, mars 01, 2007
C'est ce qui s'appelle ne pas perdre de temps...
On apprenait aujourd'hui que nos braves voisins planchaient déjà sur la création d'un remake de The Lives of Other, tout frais oscar du meilleur film étranger écrit et réalisé par Florian Henckel von Donnersmarck qui n'a sûrement même pas du encore avoir le temps de choisir un endroit chez lui où poser sa statuette
Chapeauté par les frangins Weinstein (qui d'autres?), le projet qu'on annonce comme un thriller hollywoodien (aïe) sera également supervisé par le tandem Anthony Minghella et Sidney Pollack.
Pourquoi? Tout simplement parce que le film, lors de sa sortie US, n'a rapporté "que" 1.3 millions et que nos zamis sont persuadés qu'avec un plus gros budget et une version anglaise, il en amasserait quelques millions de plus.
Un des clichés les plus tenaces sur le peuple américain est qu'il vit replié sur lui-même, qu'il ne sort jamais de son beau pays, que le mot passeport y semble encore être un mot étranger et
que rien ne les intéresse sauf leur réalité à eux. Si ça continue, on va finir par le croire.