jeudi, octobre 16, 2008

 

SUR LE FIL

Man on Wire, une des jolies surprises de ce 37e Festival du Nouveau Cinéma, prend l'affiche demain.

Le 7 août 1974, à 7h15 du matin, un homme marchait sur un fil entre les deux tours du World Trade Center. Au même moment, et pour les 45 minutes suivantes, le monde allait s’arrêter de tourner. Et c’était beau. Beau comme seuls peuvent l’être les moments un peu magiques. Beau comme l’ombre d’une silhouette se dessinant dans les airs, à plus de 400 mètres du sol, l’air suspendue dans le vide. Beau comme un instant d’éternité volé à la grande marche implacable de l’univers.

Cet homme, c’était Philippe Petit, funambule illuminé aux rêves de grandeur, pierrot lunaire à la fantaisie irrésistible, visage d’enfant rieur sur corps de chat agile, qui un beau matin se mit en tête l’impossible et le réalisa. Avant, il avait déjà fait l’oiseau entre les toits de la cathédrale Notre-dame de Paris ou encore au dessous d’un pont à Sydney, aidé par une équipe prête à le suivre jusqu’au bout du ciel. Des opérations menées de façon clandestine, illégale, comme le sera celle, plus insensée encore, qui le mènera en haut des deux tours à peine achevées. Mais depuis quand les oiseaux ont-ils besoin d’autorisation?

Il fallait aussi un grain de folie à James Marsh, le réalisateur britannique (Wisconsin Death Trip, The King) pour documenter l’aventure de Petit sans la rendre bêtement illustrative, platement démonstrative. Il fallait de l’audace, de l’inventivité, et un sacré sens du merveilleux pour mêler ainsi entrevues, saisissantes images d’archives et reconstitutions toutes en ombres et lumières et cadrages obliques dignes de meilleurs films noirs, sans jamais en perdre le fil. Tout ça, James Marsh l’a. Et mieux encore. Avec une fascination indéniable, il scrute l’aventure de Petit dans ses moindres détails, sautant lui aussi comme un funambule d’une scène à l’autre, maniant, lui aussi, comme le fou des airs, la poésie la plus légère avec la fantaisie la plus contagieuse.

Au final, son Man on Wire, aussi affolant qu’il est paisible, aussi dur pour le cœur qu’il est doux pour l’esprit, s’avère un morceau de pur enchantement, où la performance est saluée non pour ses possibles conséquences ou ses effets, mais simplement, gratuitement, pour la beauté du geste. Un geste en forme de pied-de-nez à la pesanteur et à la raison. Une grimace clownesque et fantasque faite à la mort devant laquelle le spectateur, ramené à l’état de l’enfant émerveillé, ne peut s’empêcher d’applaudir des deux mains.

mardi, octobre 07, 2008

 

FNC - LES COUPS DE COEUR

Après une intense cogitation, l'équipe d'ATC est enfin prête à vous dévoiler ses coups de coeur top-super-chouchous parmi la foisonnante programmation du 37e Festival du Nouveau Cinéma. À découvrir.

*Un capitalisme sentimental, d'Olivier Asselin: une fable diablement rusée, entre comédie musicale, expressionnisme allemand et film noir, sur la valeur des humains. Un ovni particulièrement original, surtout dans le paysage du cinéma québécois
*À l'ouest de Pluton d'Henry Bernadet et Myriam Verreault: un regard sur l'adolescence québécoise, comme du Gus Van Sant qui aurait embauché Louis-José Houde comme dialoguiste. Et une tirade qui tue sur Gilles patates...ou patates Gilles
*Afterschool, d'Antonio Campos: un surdoué du cinéma qui observe l'adolescence dorée américaine. Une vraie surprise
*Estomago, de Marcos Jorge: épicurien, rusé et rigolo, un voyage brésilien dans tous les plaisirs de la chair
*Wonderful town d'Aditya Assarat: une méditation mélancolique et quasi-étherée sur les possibilités de l'amour dans la Thaïlande post-tsunami
*Les bureaux de Dieu, de Claire Simon: Simon fait sa Depardon dans ce docu-fiction sur le planning familial. Actrices impeccables et scan social de haute tenue.
*Lady Jane de Robert Guédiguian: le marseillais fait dans le noir corbeau et transforme son Ascaride de femme en héroïne tragique désenchantée et rock'n roll.
*Papa à la chasse aux lagopèdes de Robert Morin: l'interprétation de François Papineau, les dialogues de Morin, une voiture, une caméra et de la neige: ça n'a l'air de rien, comme ça, mais c'est du bonbon.
*La vie moderne de Raymond Depardon: le vrai chouchou. Depardon y conclue sa trilogie des profils paysans, avec une empathie sans complaisance admirable. Redonne ses lettres de noblesses au terme feel-good movie.
*Gomorra de Matteo Garrone: voyage dans les arcanes les moins reluisantes de la mafia napolitaine, stylisation intense et naturaliste: du grand cinéma.
*L'homme sur le fil de James Marsh: l'autre vrai chouchou: 1h1/2 de funambulisme, de rêve et de poésie avec de bons gros morceaux de suspense dedans. Un enchantement.
*Séraphine de Martin Provost: Yolande Moreau trouve enfin un grand rôle dans celui de cette peintre naïve du début du siècle. Beaucoup de charme et de sensibilité
*La mémoire des anges de Luc Bourdon: à mettre dans tous les offices de tourisme du coin. Une ballade dans le Montréal d'antan via des archives de l'ONF, sans nostalgie mais avec une vraie célébration du passé.
*Sous la cagoule, un voyage au bout de la torture, de Patricio Henriquez: révoltant, choquant, aberrant mais aussi formidablement nécessaire. Du grand documentaire.
*JCVD de Mabrouk El Mechri: le plaisir coupable. El Mechri fait du Tarantino première période et transforme Van Damme en héros mélancolique et désemparé. Aware.
*Entre les murs de Laurent Cantet: histoire de vérifier que la palme d'or était bel et bien méritée pour cette observation méticuleuse (et un peu déprimante, il faut bien le dire) de l'école d'aujourd'hui.

Sans oublier, of course, Elle veut le chaos de Denis Côté et Derrière moi de Rafaël Ouellet, les deux amis d'ATC qu'on ne se lasse pas de ploguer.

À vous, maintenant.

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