jeudi, juin 05, 2008
LA GUERRE, LA GUERRE
Abu Ghraib. Il y a 5 ans, personne n’aurait su le placer sur une carte. Peut-être qu’on ne saurait toujours pas aujourd’hui. Mais entre-temps, la prison d'Abu Ghraib est, elle, devenue célèbre. Tristement célèbre. Quelques photos jetées en pâture aux médias en 2004, et l’on découvrait le vrai visage de la guerre en Irak. Une jeune soldat, frêle, tenant en laisse un homme nu rampant par terre. Des pyramides de prisonniers nus. Des thumbs up de soldats hilares devant l’humiliation.
L’Amérique a eu honte. De quoi exactement? De voir ses fils et ses filles mettre en actes simples et bestiaux son attitude face à cette guerre. Ce sont des terroristes, ils doivent payer. Et pas seulement de leur personne. De leurs âmes. De leurs dignités. Cette grande hypocrite d’Amérique ne l’a pas supporté et a fait payer une poignée de soldats fanfarons, comme on expie un péché. Ceux qui ont donné les ordres, eux, sont restés en place.
De cet endroit, de cette affaire plutôt, Errol Morris tire aujourd’hui un film, Standard Operating Procedure, en posant cette question toute simple : traîner un prisonnier de guerre en laisse, le forcer à se masturber, le prendre en photo dans une position indécente constitue-t-il un acte criminel ou une opération militaire standard?
Cette question, c’est celle à laquelle durent répondre les enquêteurs civils après que les photos désolantes d’Abu Ghraib furent rendues publiques. À eux, mais aussi aux soldats responsables (dont la "star" des photos, Lynndie England, interviewée à sa sortie de prison) et à quelques gradés, Errol Morris fait le bon vieux coup de l’accouchement maïeutique en leur faisant dérouler oralement le grand tapis des faits et de la vérité. Photos à l’appui.
Jusqu’ici, rien d’anormal. Le bon vieux documentaire joue son rôle. Mais voilà que Morris, dont le sens du spectacle avait si parfaitement rendu justice à Robert S. McNamara dans l’exceptionnel Fog Of War, se laisse prendre au jeu de la dénonciation et accumule entre ses entrevues inserts de graphiques virtuels, lettres et reconstitutions à la limite du supportable, le tout nappé par une musique sirupeuse et dégoulinante de Danny Elfman.
Le procédé est choquant. Comment Morris a-t-il pu ainsi sciemment vider ses images et les mots de son film de toute leur puissance? Comment a-t-il pu se laisser aller à tant de facilité? Comment est-il passé des analyses d’une profondeur vertigineuse de McNamara à cet étalage brutal et à la limite du sensationnalisme de faits touts nus. Et d’un coup, le déclic. Le décalage entre la forme et le fond est trop énorme pour être innocent. Non seulement Morris l’a t-il fait sciemment, mais il l’a fait, en plus, pour mieux confronter notre propre habitude à lire les images. Le rusé. La télé nous a montré la guerre, et Morris, d’une ironie plus que féroce, reprend tous ses leurres, tous ses artifices pour, en plus de son propos initial, venir nous mettre sous le nez l’absurdité du traitement médiatique de la guerre.
Alors non, SOP n’est pas un film facile à regarder. Ni à écouter. De ces soldats boucs-émissaires bien dociles à ces images terriblement choquantes, il offre à chaque spectateur l’occasion de redéfinir un peu plus précisément les limites de son code moral. Mais surtout, il confirme, sans l’ombre d’un doute, qu’Errol Morris est un documentariste hors du commun.
L’Amérique a eu honte. De quoi exactement? De voir ses fils et ses filles mettre en actes simples et bestiaux son attitude face à cette guerre. Ce sont des terroristes, ils doivent payer. Et pas seulement de leur personne. De leurs âmes. De leurs dignités. Cette grande hypocrite d’Amérique ne l’a pas supporté et a fait payer une poignée de soldats fanfarons, comme on expie un péché. Ceux qui ont donné les ordres, eux, sont restés en place.
De cet endroit, de cette affaire plutôt, Errol Morris tire aujourd’hui un film, Standard Operating Procedure, en posant cette question toute simple : traîner un prisonnier de guerre en laisse, le forcer à se masturber, le prendre en photo dans une position indécente constitue-t-il un acte criminel ou une opération militaire standard?
Cette question, c’est celle à laquelle durent répondre les enquêteurs civils après que les photos désolantes d’Abu Ghraib furent rendues publiques. À eux, mais aussi aux soldats responsables (dont la "star" des photos, Lynndie England, interviewée à sa sortie de prison) et à quelques gradés, Errol Morris fait le bon vieux coup de l’accouchement maïeutique en leur faisant dérouler oralement le grand tapis des faits et de la vérité. Photos à l’appui.
Jusqu’ici, rien d’anormal. Le bon vieux documentaire joue son rôle. Mais voilà que Morris, dont le sens du spectacle avait si parfaitement rendu justice à Robert S. McNamara dans l’exceptionnel Fog Of War, se laisse prendre au jeu de la dénonciation et accumule entre ses entrevues inserts de graphiques virtuels, lettres et reconstitutions à la limite du supportable, le tout nappé par une musique sirupeuse et dégoulinante de Danny Elfman.
Le procédé est choquant. Comment Morris a-t-il pu ainsi sciemment vider ses images et les mots de son film de toute leur puissance? Comment a-t-il pu se laisser aller à tant de facilité? Comment est-il passé des analyses d’une profondeur vertigineuse de McNamara à cet étalage brutal et à la limite du sensationnalisme de faits touts nus. Et d’un coup, le déclic. Le décalage entre la forme et le fond est trop énorme pour être innocent. Non seulement Morris l’a t-il fait sciemment, mais il l’a fait, en plus, pour mieux confronter notre propre habitude à lire les images. Le rusé. La télé nous a montré la guerre, et Morris, d’une ironie plus que féroce, reprend tous ses leurres, tous ses artifices pour, en plus de son propos initial, venir nous mettre sous le nez l’absurdité du traitement médiatique de la guerre.
Alors non, SOP n’est pas un film facile à regarder. Ni à écouter. De ces soldats boucs-émissaires bien dociles à ces images terriblement choquantes, il offre à chaque spectateur l’occasion de redéfinir un peu plus précisément les limites de son code moral. Mais surtout, il confirme, sans l’ombre d’un doute, qu’Errol Morris est un documentariste hors du commun.
Comments:
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Le plus triste, c'est qu'un être humain puisse encore torturer un de ses semblables en toute impunité en 2008,2020? 2050? 2100?
Cette prison est un exemple de défaite de l'humanité.Mais que faire dans cette guerre de religion où tu dois Croire ou Mourir?
Les deux belligérants se réclament de leur Dieu pour justifier leurs exactions.Guerre de Religions version 2008.
Choose your worms before they choose you.
Cette prison est un exemple de défaite de l'humanité.Mais que faire dans cette guerre de religion où tu dois Croire ou Mourir?
Les deux belligérants se réclament de leur Dieu pour justifier leurs exactions.Guerre de Religions version 2008.
Choose your worms before they choose you.
Une petite vidéo satirique sur le grand danger terroriste :
http://fr.youtube.com/watch?v=_dmiCuVspzc
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http://fr.youtube.com/watch?v=_dmiCuVspzc
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