vendredi, mai 02, 2008

 

AU CROISEMENT DES PARALLÈLES

L’amour, la mort, le mal. Trois thèmes sous l’égide desquels Fatih Akin placera cette trilogie dont il rêve. Le diamant brut Head-On, en 2005, en était l’amorce. L’apaisé De l’autre côté, aujourd’hui, nous invite à poursuivre le voyage.

Chassé-croisé de 6 destins entre Istanbul et Hambourg, De l’autre côté est en effet un film étonnement calme et serein. L’on y mourra pourtant, l’on y aimera aussi, fort et violemment. Mais l’on y trouvera une paix étrange et singulière. C’est que De l’autre côté, sous ses dehors fluides et tempérés, est avant tout un film bien construit. Un film confortable et géométrique, même, mêlant ses lignes de fuite, ses parallèles et ses points de concentration avec souplesse et subtilité, laissant à d’autres la rigidité et la froideur des démonstrations. La spontanéité dans le contrôle, en somme. Car si la thèse, l’antithèse et la synthèse se laissent admirer, elles seront habilement disséminées au long des 3 chapitres du récit, à travers 6 personnages vivants, émouvants, bouillonnants, se révélant les uns au contact des autres. 6 personnages qui délicatement, par le détail, marqueront la vie les uns des autres.

Yeter, la prostituée au visage dur (Nursel Köse), Ayten, sa fille, pasionaria politique aux yeux de braise (Nurgül Yesilcay), Charlotte, la belle amoureuse généreuse (Patrycia Ziolkowska), Suzanne sa mère douce perdue (Hanna Schygulla, égérie fassbinderienne qu’on revoit avec un plaisir non dissimulé), Ali le vieil homme à la santé fragile (Tuncel Kurtiz) et Nejat son fils, l’universitaire tristounet (Baki Davrak) formeront donc la toile de cet entrelacs familial aux riches résonances politiques.

Car au-delà des relations personnelles qu’il observe avec un évident plaisir, Akin n’en oublie jamais de dresser le portrait de ses pays, l’Allemagne et la Turquie, sans complaisance ni misérabilisme.

Alors, oui, De l’autre côté n’a peut-être pas la sauvagerie folle, la vivacité pleine et brûlante de Head-On. Mais avec un sens de l’ellipse et de la pudeur magistral, des cadrages inventifs et des images au relief chaleureux, et surtout sans jouer d’emphase, il sait être un film emphatique et sensible. Et joue ainsi parfaitement son rôle de centre de trilogie, ouvrant les perspectives vers un ailleurs qu’on a maintenant hâte de découvrir.

Comments:
j'ai cru remarquer qu'il planait sur ce film une forte odeur de inarritu. ou de paul haggis...
et voilà que dans le toujours excellent journal "ici" (sic) j'apprenais aujourd'hui que fatih akin est allé peaufiner son scénario au mexique, chez nul autre que guillermo arriga. zzz.

the visitor, aborde des thèmes (pas tous mais certains) similaires sans plonger dans les manières et /ou les goûts du jour. un beau film américain comme on en voit rarement en salle.

je continue de préférer crossing the bridge aux films de fiction de akin. la musique, c'est ce qu'il véhicule le mieux.
 
Haggis, oui, c'est vrai. Inarritu, je ne sais pas. Akin est quand même beaucoup moins manipulateur, beaucoup plus spontané. Et surtout, lui, il aime vraiment ses personnages!

The visitor? Je vais aller voir ça, alors.
 
moins manipulateur peut-être
mais toujours prêt à sortir n'importe quel lapin de son chapeau pour filmer un tarmac de plus...
 
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